mardi 24 novembre 2009

Demain - Texte de Julie Pirlot

Plongée dans un film d’horreur; une ambiance froide pèse lourdement sur le public. Demain…, on se demande s’il existera encore tout au long de ce solo de Michèle Noiret. Bruit de vieux lampadaires qui s’allument et s’éteignent au-dessus d’un être humain d’allure fragile. Des spasmes, des accélérations de mouvement, des crises habitent le corps de l’interprète. Elle se débat contre quelque chose qui nous est invisible. Des bruits sourds, une musique angoissante, grésillement d’insectes persistant comme une nuée qui envahit un corps, des voix fantomatiques qui se propagent partout autour de nous. Ces voix esquissent un écho ressemblant à un poème. On est oppressé par tout ce bruit. Des lumières aveuglantes donnent un aspect de silhouette sombre à la danseuse. Comme par magie, la 7e Symphonie de Beethoven calme cette atmosphère terrifiante. Michèle Noiret danse et nage au rythme du piano dans une lumière apaisante. Une bouffée d’air en plein cauchemar.
On pense être enfin libéré d’un mauvais rêve, mais on replonge aussitôt dans un univers lugubre, comme si tout n’avait été que vain espoir. Un écran en noir et blanc, une femme dans une baignoire, l’eau coule de l’écran… L’imaginaire, le fictif se mélange à la réalité. Les mouvements de cette femme sont nébuleux, indistincts, un esprit l’habite.
Assise sur une chaise,  Michèle Noiret subit un mal, une douleur provenant des voix que l’on entend et des images fantomatiques projetées sur la toile. Ces images nous font basculer dans un monde rempli de spectres où tout ce que l’on respire est inquiétude profonde.
Elle danse dans une lumière rouge qui provoque le tourment. Des soupirs d’étonnement et de peur composent la musique qui l’entraîne. Des bruits de frayeur servent de beat box sur une ligne de basses qui fait naître la peur au ventre.
L’image de l’écran change… Une avalanche de déchets tombe comme des centaines de cadavres jetés dans un trou. L’image de l’écran change… Une femme s’assied à une table face à un crâne de bouc comme si elle sympathisait avec le diable. Elle remplit un verre et le boit comme pour fêter sa propre mort. Elle est possédée, désespérée. Elle disparaît et apparaît, emprisonnée d’une force, se couche et danse sur la table. Une image d’exorcisme plane, elle cherche une échappatoire.
Encore une fois, on est pris par un sentiment de malaise par ce mélange de vrai et de faux… On voit l'interprète comme sortir de l’écran, prête à s’enfuir devant nous, impuissants. Filmée dans le passé, dans le présent, on la regarde sur le plateau, à l’écran. Comme si la caméra filmait un esprit, son fantôme. Et c’est tendu, captivé, que l’on continue à suivre ce voyage aux accents morbides.
La Symphonie se rejoue et les déchets que l’on regardait tomber sur l’écran se mettent cette fois à réellement tomber sur scène. Michèle Noiret danse parmi ces papiers chiffonnés. L’écran est toujours présent, l’esprit qui l’habite aussi… Et elle s’accroche à la toile, la frappe, tente même de la déchirer comme pour en terminer avec toute cette angoisse. Des images de sa main apparaissent sur des sons chaotiques, frappe sur l’écran, comme pour blesser un esprit habitant à l’intérieur. Une pluie tombe sur un rideau noir. Michèle Noiret nous regarde, elle est vide. Par les seuls sons de sa respiration, un parfum d’angoisse et de questions sur la mort nous parvient.
On ressort de l’univers dans lequel on est resté bloqué depuis le début du spectacle, troublé...

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